Théâtre

César

César, dernier volet de la trilogie marseillaise de Marcel pagnol.
César, dernier volet de la trilogie marseillaise de Marcel pagnol.

Comédie en deux parties et dix tableaux.
Théâtre des Variétés (1946).

Principaux interprètes à la création

Henri Vilbert – César
Alibert – Marius
Raymond Pellegrin – Césariot
Arius – Panisse
Orane Demazis – Fanny
Margueritte Chabert – Honorine
Maupi – Le chauffeur
Milly Mathis – Claudine

Résumé

Panisse est mourant. Vingt ans ont passé depuis son mariage avec Fanny. Avant de s’éteindre, il confie à son ami Elzéar, le curé, une lettre à remettre à Fanny, après sa mort. Puis, il demande à Césariot, leur fils rappelé à son chevet, de veiller sur sa mère. Plus tard, pour respecter les dernières volontés de son mari, Fanny apprend à Césariot que Panisse n’était pas son vrai père et qu’il est en réalité le fils de Marius. Ce dernier travaille maintenant dans son garage, à Toulon, avec un associé, individu peu recommandable qui, pour plaisanter, fournit à Césariot de bien mauvais renseignements sur son père.
Césariot met en garde Fanny quand il lui parle de Marius pour qui il éprouve, malgré tout, une sympathie grandissante. Lorsqu’il viendra voir son père, César, Marius trouvera les mots pour convaincre Fanny qu’il n’a jamais cessé de l’aimer.

Extrait

HONORINE
Quand on s’est bien confessé, et bien repenti, ça va au paradis.

CÉSAR
Oui, peut-être. Mais moi, il y a une idée qui me tracasse :
le Bon Dieu d’Elzéar, – le nôtre, enfin – si ça N’ÉTAIT PAS LE VRAI ?

ESCARTEFIGUE (épouvanté)
Oh, couquin de Diou !

HONORINE (scandalisée)
Mais qu’est-ce-que vous dites ?

CÉSAR
Je veux dire que je connais des musulmans, des hindous, des chinois, des nègres. Leur Bon Dieu, ce n’est pas le même, et ils ne font pas comme nous !…
Nous, nous avons des péchés que chez eux c’est une bonne action, et vice versa… Peut-être qu’ils ont tort, remarquez bien… Seulement ils sont des millions de milliasses… S’ils avaient raison, Monsieur Brun ?

M. BRUN
Il est certain que la question peut se poser.

CÉSAR
Le pauvre Honoré est tout préparé, bien au goût du Bon Dieu d’Elzéaz. Et si, en arrivant au coin d’un nuage, il se trouve en face d’un Bon Dieu à qui on ne l’a jamais présenté ? Un Bon Dieu noir, ou jaune, ou rouge ? Ou un de ces Bons Dieux habillés en guignol, comme on en voit chez l’antiquaire, ou celui qui a le gros ventre ?
Ou bien celui qui a autant de bras qu’une esquinade ?
Le pauvre Panisse, qu’est-ce-qu’il va lui dire ? En quelle langue ?
Avec quels gestes ? (À Escartefigue) Tu te vois, toi, déjà fatigué par ta mort, et tout vertigineux de ton voyage, en train de t’expliquer avec un Dieu qui ne te comprend pas ? Et tu as beau lui faire des prières, il te dit :
« Quoi ? Comment ? Qu’est-ce que vous dites ? »
Et il te le dit en chinois ?

ESCARTEFIGUE
Situation terrible. Là, tu me donnes le grand frisson. (Il boit.)

HONORINE (en colère)
Taisez-vous, grand mécréant. Et la Sainte Bible, alors, c’est des mensonges ? Et les Évangiles ? Vous n’avez pas honte de dire des choses pareilles devant l’enfant de chœur ?

CLAUDINE (sarcastique)
Si vous alliez un peu plus souvent à l’église, au lieu de boire tant de pastis, vous sauriez qu’il n’y a qu’un Bon Dieu !
Et ce Dieu, c’est le nôtre.

CÉSAR
Oui, évidemment, le bon, c’est le nôtre. Mais alors, sur la terre, il y a beaucoup de gens qui sont couillonnés. Ça me fait de la peine pour eux. N’est-ce pas, Monsieur Brun ?

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